Les arrêtés des communes ont souvent été retoqués par les tribunaux administratifs saisis par les préfets, voire Enedis. Ainsi, la ville de Blagnac a dû revoir sa copie. L’arrêté qu’elle avait pris, relatif aux conditions d’implantation des compteurs Linky le 16 mai 2018, a été suspendu pour partie cet automne. Le tribunal a estimé que le maire n’était pas compétent pour demander à Enedis de garantir aux usagers la liberté de refuser ou accepter la pose d’un tel compteur par exemple.
C’est un tout autre cas qui a concerné Romilly-sur-Andelle en Normandie. Son édile avait écrit le 4 avril 2018 à Enedis lui demandant que ses administrés puissent avoir le choix d’opter pour l’installation d’un compteur Linky ou la conservation de l’ancien, sans contrepartie financière. Un courrier qui ne vaut pas décision, a jugé ce 14 janvier 2019 le tribunal administratif de Rouen saisi par Enedis. L’opérateur a donc été débouté et devra verser une somme de 1 000 euros à la commune au titre des frais engagés par celle-ci.
Faute d’être entendus individuellement, des usagers s’opposant à Linky se sont mobilisés au sein de collectifs et ont décidé de porter leur parole devant les tribunaux correctionnels. Et force du nombre, c’est collectivement qu’ils assignent Enedis en justice. A la clef, des frais de procédure partagées. C’est ainsi que 243 personnes du Pays Basque et du Béarn, des Landes et des Hautes-Pyrénées se sont réunies pour attaquer Enedis Tarbes, la direction régionale dont elles dépendent, au tribunal de grande instance de Tarbes. Une action collective à l’initiative de l’association angloy CALA, avec l’appui des collectifs anti-linky des Landes, du Béarn et des Hautes-Pyrénées.
Parmi les raisons évoquées : violation de propriété privée, non-respect de la vie privée, modification unilatérale du contrat assortie de pratiques commerciales trompeuses et agressives, non-respect des normes de sécurité, manque de formation des poseurs pour une activité à risque, infraction au code de l’environnement..
“Enedis ne respecte pas les règles, dénonce Pascal Burgues du collectif CALA. L’entreprise invoque ainsi un règlement européen qui imposerait Linky. C’est faux : sept pays de l’Union ont dit non. Ces personnes veulent que leur choix soit reconnu et pour ceux chez qui Linky a déjà été installé, que ce compteur soit retiré. Nous espérons que cette action devant le tribunal de grande instance permettra un jugement sur le fond.”
Et Pascal Burgues d’évoquer des problèmes de sécurité lors de la pose des compteurs communicants. Des problèmes pour lesquels le collectif a saisi par courrier le Sdepa, Syndicat d’énergie des Pyrénées-Atlantiques, et le préfet du département. Enedis ne respecterait pas le règlement sanitaire départemental fixé par arrêté préfectoral.
Ainsi, de nombreux compteurs Linky sont posés sur des panneaux en bois. Un procédé qui “est non conforme aux normes électriques NFC 14 100 et 15 100 imposées dans le RSD. Nous demandons au SDEPA et à la préfecture de mettre Enedis et ses prestataires en demeure de respecter les normes en vigueur”. Pour l’heure, ces deux courriers sont restés lettres mortes.
“La procédure sera de longue haleine”, prévient maître Jean-Pierre Joseph, avocat militant au barreau de Grenoble qui défendra les droits des 243 personnes pyrénéennes. Les audiences de mise en état vont se succéder où les arguments de chacun seront déposés électroniquement et examinés. Ce n’est qu’après ces audiences que le tribunal fixera une date pour les plaidoiries. Voilà qui laisse encore un peu de temps à d’autres personnes qui voudraient intenter une action contre Enedis et se joindre au collectif de le faire. Après une première audience de mise en état le 8 janvier dernier, la prochaine se tiendra le 5 février prochain.
Parmi ces requérants, des personnes souffrant d’électro-sensibilité. Jean-Pierre Joseph connaît bien le sujet. Voilà quelques années, en 2016, le tribunal de grande instance de Grenoble avait statué en référé le retrait du compteur d’eau communiquant pour une de ses clientes, diagnostiquée électro sensible. Mais ces décisions restent exceptionnelles, reconnaît l’avocat.
“Cinq mille personnes en France ont déjà intenté une action de groupe, mais en référé”, ajoute l’avocat grenoblois. Une procédure différente que celle que nous avons engagée à Tarbes. Le tribunal examinera l’affaire sur le fond. Ce sera une première. D’ailleurs, nous allons être suivis à Perpignan sur une procédure similaire à la nôtre de 109 habitants des Pyrénées-Orientales, et à Bordeaux.” Là comme ici, les personnes veulent que leur droit à décider soit simplement reconnu. Et si le compteur Linky est déjà posé, qu’il soit remplacé par un compteur non communicant. “Dans le cas où Linky a déjà été installé, le recours judiciaire est la seule voie possible pour faire valoir son droit”, précise Jean-Pierre Joseph.
Source : http://ace.hendaye.over-blog.fr/2019/01/linky-le-compteur-communicant-qui-electrise-les-citoyens.htmlDe notre côté, les collectifs anti Linky d'Aquitaine Nord (Gironde, Dordogne et Lot et Garonne) rencontraient Me J.P. Joseph mardi 5 février 2019 pour lancer le dépôt de la même procédure contre Enedis Mérignac de la part de plus de 610 plaignants (317 hommes et 293 femmes) dont 171 personnes soit EHS soit avec des problèmes de santé.